On nous dit et nous répète à l’envie que la France vit au dessus de ses moyens depuis 40 ans et se retrouve maintenant sur-endettée. Bien sûr ce raisonnement, très lumineux au comptoir du café du commerce, s’appuie sur une comparaison avec la dette des autres pays bla bla bla. Le problème, tout le monde s’intéresse à l’endettement public et passe à côté de l’endettement privé:



On constate deux choses. L’endettement privé en France est relativement faible par rapport aux autres pays européens. Et trois des pays qu’on nous présentait comme dynamiques jusqu’en 2008 (Espagne, Irlande, UK) ont vu leur endettement privé s’envoler. Bien sûr, cela pourrait être le résultat d’investissements massifs de la part de leurs entreprises ce qui n’est pas mauvais pour l’économie. Jetons y donc un coup d’œil:


En fait, à part l’Espagne et l’Autriche, aucun pays n’a d’investissements vraiment au-dessus de la moyenne. Pire, les investissements des entreprises au Royaume-Uni et en Irlande sont même décevants. L’envolée de l’endettement privé vient bien des ménages:


Mais qui est surendetté ?
On nous parle de la France, mais sans prétendre que tout va très bien, il faut reconnaître une certaine cécité aux Cassandres autoproclamées. Et cela ne date pas d’hier. Le traité de Maastricht reposait déjà sur l’idée que l’endettement public était à surveiller mais qu’il ne pouvait y avoir de problème avec celui du secteur privé. Une bulle immobilière et une crise financière plus tard on voit le résultat! Et il faut dire que privé comme public, l’endettement stimule l’économie. A tel point les anciens champions économiques se payaient le luxe d’un chômage en chute libre et d’une dette publique relativement faible à la veille de la crise de 2008.


Mais quand on parle de surendettement et de problème de solvabilité, on ne peut non plus séparer les deux. Après tout, en tant que citoyens contribuables nous sommes responsables de nos dettes à titres privés en même temps que de celles de l’État qui gouverne en notre nom. Alors je n’irai pas jusqu’à prétendre comme d’autres qu’il existe des seuils de dettes publiques ou privées à partir desquels rien ne va plus.  Par contre je remarquerai juste que même si l’endettement continue à augmenter en France ce qui peut être inquiétant, nous avons encore du chemin à parcourir avant d’atteindre les niveaux de nos voisins européens. Mais dans tous les cas, je ne m’aventurerai certainement pas à déclarer la fin de la crise de la dette en Grande-Bretagne et en Espagne

A Propos
Je remarquerai aussi qu’on nous explique depuis 30 ans que les recettes de la croissance sont moins d’impôts, moins de réglementation, moins d’État, moins de protection sociale etc. Quoiqu’il arrive, il s’agit toujours les recettes magiques à appliquer. Est-ce que depuis 2009, Grande-Bretagne, Espagne, Irlande ou même les USA qu’on nous montrait tous en modèle ont cessé de les appliquer? Non. Par contre, tous ces pays ont connu jusqu’en 2008 une envolée de la dette des ménages s’appuyant sur une bulle immobilière et dans le même temps réussi à financer à bas coût cette dette et son corollaire, leurs déficits des comptes courants. Bien sûr, tout cela n’a qu’un temps, et quand le jeu s’arrête, c’est la crise.