Kezako? Il s’agit d’une égalité comptable, elle reste toujours vraie aux erreurs de calculs et approximations près. Il s’agit de deux approches différentes du PIB, faites aux frontières d’un pays sur une période donnée (une année). L’INSEE utilise d’autres approches, similaires, mais moins pratiques à appréhender je trouve.

Approche demande/dépenses: PIB+M=C+G+I+X
M: Importations de biens et services
C: Dépenses privées (entreprises + ménages) de consommation finale (biens durables, non-durables et services)
G: Dépenses publiques (bien de consommation finale, salaires etc.) Exclu les transferts comme la sécurité sociale, assurance chômage etc.
I: Investissements (dans le pays)
X: Exportations de biens et services

Approche disposition du PIB: PIB=C+S+T
S: Épargne privée (produits financiers, titres de dette, etc.)
T: Taxes

En comparant les 2 approches (S-I)+(T-G)=(X-M)
On obtient ainsi une balance des paiements simplifiée. (T-G) est le déficit budgétaire de la puissance publique. Pour un peu plus de détail, voir ici. Alors quel est l’intérêt? Mettre en évidence quelques principes économiques fondamentaux.

L’épargne d’un pays, c’est à dire des acteurs privés et public, est égale au solde des échanges commerciaux.
Exemple, le Japon. Avec l’endettement public ayant explosé depuis 1991 pour dépasser aujourd’hui les 240%! La balance commerciale est restée positive, l’État Japonais a essentiellement emprunté auprès de sa population.

Des excédents commerciaux sont le signe d’une sortie de capitaux
Quand le mouvement est hors de contrôle, cela s’appelle une fuite, exemple la crise asiatique de 1997.
Est-ce dramatique? Si un pays a emprunté dans une autre devise que la sienne (ex dollar ou euro), oui clairement. La fuite des capitaux fait chuter la valeur de sa monnaie et l’endettement explose. Dans le cas contraire, non pas vraiment et cela peut même être une bénédiction. Exemple, les US dont les exportations auraient bien besoin d’un dollar plus faible et qui se passeraient bien des « investissements » de la banque centrale chinoise dans ses bons du trésor.

Une balance commerciale excédentaire n’est pas le signe d’une économie forte
Pour preuve, à partir de la fin du XIXème siècle, Grande-Bretagne, France et Allemagne avaient tous les 3 une balance déficitaire! Comment? En la finançant avec une fraction des colossaux revenus de leurs investissements à l’étranger. On peut aussi à nouveau observer les excédents japonais depuis 1991.

Voici plutôt une liste des méthodes éprouvées pour obtenir des excédents commerciaux:

  • Pomper de l’argent dans l’économie de son voisin: Japon depuis les années 80 et Chine années 2000
  • Tout en matraquant sa consommation: Chine et Allemagne des années 2000
  • Placer ses revenus pétroliers dans un fond souverain: Norvège, Arabie Saoudite
  • Une bonne crise économique: Japon 1991-2013(?)
  • Perdre 2 guerres mondiales et rembourser de lourdes indemnités: Allemagne XXème siècle
  • Ses voisins se font la guerre et je leur vends des armes: Go USA

A part ça, j’ai du mal à trouver des exemples dans lesquelles une économie est à la fois riche, en croissance et avec des excédents commerciaux. On trouve les USA dans les années 1920 et la période 1945-1970, mais à l’époque les besoins en capitaux de l’Europe pour sa reconstruction et son rattrapage économique étaient phénoménaux. Fondamentalement, une balance commerciale positive est donc d’abord et avant tout le signe d’un excès d’épargne. Un excès qui gagnerait probablement à être investi dans l’outil productif. Ou quand on constate la misère terrible dans laquelle vit encore une large fraction de la population chinoise, les excédents de la Chine seraient certainement mieux utilisés en augmentant son niveau de vie plutôt qu’en investissant dans des bons du trésor américain qui ne rapportent essentiellement pas grand chose.

Sauf à exporter sur Mars
La 2ème conséquence de cette égalité est que si un pays décide d’épargner/exporter, il doit trouver d’autres pays prêts à s’endetter/importer. L’Asie, après la crise de 1997, a trouvé l’Occident « able and willing ». La question est de savoir ce qui se passe quand, suite à une crise financière sévère, les ménages et les entreprises des différents pays essayent tous, simultanément, de se désendetter.

  • Soit les États prennent partiellement le relais. En 2009, Uncle Sam a laissé exploser la dette fédérale, mais son déficit commercial en contraction montre qu’il a essentiellement emprunté auprès de sa propre population.
  • Soit on trouve rapidement une autre planète vers qui exporter. Mars?
  • Soit l’économie s’effondre. Après tout, vos dépenses sont mes revenus et vice-versa.

Le cas de la zone euro
à suivre dans le prochain post